L’avis de Rem : Decarnation, Songe introspectif dans les limbes
En cette funeste journée, nous allons nous attarder sur Decarnation, le premier jeu du studio français Atelier QDB et édité par Shiro Unlimited.
Cette plongée psychédélique horrifique en pixel art est disponible depuis le 31 mai 2023 sur PC et Nintendo Switch.
Expérience unique mélangeant introspection et narration fantasmagorique, Decarnation parvient-il à éviter les pièges d’une mésaventure se perdant dans un labyrinthe de bonnes intentions ?
Paris, 1990.
Gloria Debaste est une danseuse de cabaret amenée à voir sa vie drastiquement basculer suite à un évènement tragique.
Si la vie de Gloria semble être ancrée dans une routine quotidienne, Decarnation vous fait rapidement comprendre que le passé du personnage est pavé d’expériences, accompagnées de l’impact que celles-ci peuvent avoir sur son mental.
Pas toujours très clair quant à ces évènements antérieurs, le jeu se charge de remettre en contexte la vie sociale et familiale de Gloria, afin de donner plus de consistance au personnage. Pourtant, l’aventure jouera constamment sur les non-dits préférant tout miser sur sa scénographie de manière à promulguer son message.
Pour cause, la narration et l’ambiance visuelle s’appuient sur de grands noms du genre « horrifique/introspectif/fantasmagorique/… » et j’en passe. Vous retrouverez dans les inspirations les plus évidentes le travail de réalisateurs tels que David Lynch (Twin Peaks, Mulholland Drive, Blue Velvet, …), Satoshi Kon (Perfect Blue, Paprika,..), ou encore des références évidentes à la saga vidéoludique Silent Hill.
La narration et l’ambiance visuelle s’appuient sur de grands noms du genre horrifique/introspectif/fantasmagorique/…
S’évertuer à créer une expérience vidéoludique mimant les plus grands en la matière d’exploration de l’inconscience est une tâche risquée. Decarnation parvient à ne pas s’enliser dans une singerie sans âme et sans saveur en proposant une expérience venant compléter les œuvres des maîtres.
Dès l’instant où la vie de Gloria bascule dans l’horreur la plus totale, le jeu s’amuse à alterner songe et moment de vie réel, en laissant planer le doute sur ce qui existe bel et bien.
Ces voyages incessants au sein du for intérieur du protagoniste représentent une lutte constante à l’encontre de ses propres démons. Parfois indiquer très clairement, parfois volontairement très floue, la signification de nos actes se matérialise toujours comme des moments clés dans l’éveil de Gloria.
Malheureusement, l’ensemble n’accomplit pas la prouesse de nous transposer les émotions de Gloria. Le lien ne se matérialise jamais et d’acteur, nous passons au rôle de spectateur.
Une dernière danse
Pour accompagner sa narration, l’épopée cauchemardesque de Gloria s’appuiera sur des mini-jeux. Toujours pensés en adéquation aux calvaires mentaux traversés par GloGlo, ces petites épreuves se montrent très souvent inintéressantes et dispensables. Comme la récurrence de scènes où Gloria dansera en rythme sur le tempo d’un QTE.
La présence de ces différentes phases de gameplay donne le sentiment d’exister en vue de tromper la monotonie, une peur de l’ennui, dans un jeu essentiellement marqué par son histoire.
Les mini-jeux se montrent très souvent inintéressants et dispensables.
Basée sur la lecture et le principe de la balade, la jouabilité ne mettra jamais à l’épreuve le joueur. Quelques combats de boss par-ci, quelques énigmes pas bien compliquées par-là et nous voilà à la fin du jeu après 5h de jeu.
LE clou du spectacle
Même si gameplay a le mérite de tenter de casser la routine d’un jeu fondamentalement narratif, ce n’est pas sur cet aspect que le jeu se démarque.
En brillant de par sa direction artistique tout en pixel art 2D, Decarnation se permet de tomber dans l’allégresse du body horror. Ne se refrénant jamais, le studio QDB ose certaines séquences malsaines, sans ne jamais tomber dans la facilité. Le sens des visuels abjects observé sert toujours le récit et n’apparait pas simplement pour choquer sans interprétation.
Du gore corporel aux compositions ahurissantes de la cité intérieure de Gloria, la cohérence visuelle de l’œuvre force l’admiration.
Le sens des visuels abjects observé sert toujours le récit et n’apparait pas simplement pour choquer sans interprétation.
Comme si la direction artistique ne suffisait pas, les différentes ambiances sonores et musiques composées pour Decarnation parviennent à décupler l’atmosphère glauque et pesante du titre. Pour ce faire, le jeu a pu compter sur le travail de Akira Yamaoka, compositeur culte de la saga Silent Hill.
Le Youtuber ALT 236 a également pris part à l’aventure, en composant 2 musiques au côté de son compère AL9000.
Edité par | Shiro Unlimited | Public | +16 |
Développé par | Atelier QDB | Fourni par l’éditeur | Non |
Date de sortie | 31 mai 2023 | Testé sur | Nintendo Switch |
Plateformes | PC et Switch | Temps de jeu | 5h |
Les points positifs | Les points négatifs |
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• Une direction artistique en pixel art à faire frémir | • Un gameplay lambda sous forme de mini-jeux |
• Une OST glauque et angoissante | • Quelques petits bugs visuels / Erreurs de traductions |
• Une narration soignée | • … mais qui oublie de faire passer des émotions |
Decarnation est une belle promesse sur le papier. En se revendiquant comme une œuvre ultra-référencée par Lynch et Satoshi Kon, la comparaison devient inévitable. Même si le jeu réussit à emprunter à ces figures emblématiques du cinéma, le résultat final manque le coche en ne parvenant jamais à véhiculer les émotions de sa protagoniste. Néanmoins, le travail visuel et sonore suffit amplement à attirer l’attention sur les pérégrinations fantasmagoriques de Gloria.
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