Avis Hell is Us : Bienvenue aux âmes perdues prêtes à errer dans les ruines d’un monde dévasté !
Sorti le 4 septembre 2025 sur PC, PlayStation 5 et Xbox Series X|S, Hell is Us s’annonçait comme une œuvre atypique : un RPG d’action refusant les codes du jeu guidé, misant sur la liberté d’exploration et un propos fort sur la guerre. Aux manettes, le studio Rogue Factor, soutenu par Nacon, promettait une aventure où mystique et politique se mélangent dans un monde ravagé par les conflits.
Mais cette ambition est-elle à la hauteur ? Le pari de ne jamais tenir le joueur par la main fonctionne-t-il vraiment ? Et surtout, le récit de Rémi, à mi-chemin entre quête personnelle et drame collectif, parvient-il à convaincre autant que son atmosphère oppressante ?
Une quête intime au cœur du chaos
Dans Hell is Us, on prend le contrôle de Rémi, un homme parti sur les traces de ses parents dans un pays déchiré par un conflit fratricide. Ce voyage, à première vue intime, s’inscrit rapidement dans une fresque plus large : celle d’un monde ravagé par la guerre, où l’humanité semble avoir perdu tout repère moral.
Mais là où le jeu se distingue, c’est dans la couche surnaturelle qu’il ajoute à cette tragédie. Comme si les ruines et les cadavres n’étaient pas suffisants, des créatures mystiques rôdent dans l’ombre. On comprend alors que la guerre n’a pas seulement détruit des villes et des vies, elle a engendré ses propres monstres. Ces entités semblent moins être de simples menaces que les reflets de la violence humaine, des incarnations grotesques de ce que la haine et la vengeance finissent toujours par créer.
La guerre n’a pas seulement détruit des villes et des vies, elle a engendré ses propres monstres.
Rémi, pris dans cette spirale, refuse pourtant d’appartenir à un camp. Ni soldat, ni rebelle, il devient une figure en marge, un témoin impliqué malgré lui. Ce choix scénaristique est essentiel : en refusant la logique du camp, le jeu pose une question fondamentale. Peut-on réellement choisir un côté dans une guerre où les deux parties se livrent aux mêmes atrocités ? Ou faut-il, au contraire, rester en retrait pour mieux observer et comprendre ?

Une histoire personnelle qui manque d’impact
Si la neutralité de Rémi nourrit une réflexion intéressante, son histoire personnelle l’est beaucoup moins. La recherche de son père, de sa mère, de ses origines, reste convenue et assez fade. Elle ne parvient jamais à captiver, ni à s’élever au niveau du discours plus large que le jeu développe sur la guerre et la monstruosité humaine.
Le dénouement de cette quête intime retombe à plat.
Pire encore, le dénouement de cette quête intime n’apporte finalement pas grand-chose. On aurait pu espérer une révélation forte, un contrepoint au propos politique, mais tout cela retombe à plat. Cette faiblesse narrative crée un contraste étrange : le monde et son ambiance nous marquent bien plus que l’histoire du protagoniste, censée en être le moteur.

Un RPG d’action qui vend la liberté mais affiche ses limites
La promesse du jeu est séduisante : pas d’indicateurs, pas de carte saturée d’objectifs, juste l’observation et l’écoute pour progresser. Une invitation à se perdre, à se laisser guider par l’instinct et la curiosité.
Mais cette ambition se heurte vite à une contrainte de taille. Les cartes sont semi-ouvertes, certes, mais leur petite dimension trahit vite le mirage. L’exploration se réduit à un réseau de couloirs, suffisamment grands pour donner l’illusion de liberté, mais trop contenus pour que l’on se sente réellement perdu. C’est un paradoxe : au début, on se réjouit d’avoir à chercher son chemin, de devoir prêter attention aux détails, puis très vite on se rend compte que le fil n’est jamais bien loin.
Les cartes semi-ouvertes donnent l’illusion de liberté mais se réduisent à un réseau de couloirs.
Les quêtes secondaires illustrent bien cette tension. Elles consistent souvent à retrouver des objets, sans indication claire de leur emplacement. Sur le papier, cela colle parfaitement à la philosophie du jeu. Mais dans la pratique, ces objets finissent presque toujours par tomber sur notre route. On progresse donc plus par hasard que par intuition, et la liberté promise ressemble alors à une mise en scène.

Les combats : une mécanique familière, mais sans rugosité
Au combat, le jeu évoque immédiatement les Souls-like. On retrouve ce côté méthodique, où chaque coup compte, où l’esquive et le timing sont censés primer. Pourtant, l’exigence de ce modèle n’est pas au rendez-vous. La régénération de vie rend les affrontements beaucoup plus indulgents et les ennemis ne se montrent pas assez féroces pour que la tension prenne.
Les glyphes, censés diversifier les approches, apportent une certaine richesse au début. Mais très vite, on constate que peu importe la configuration choisie, tout finit par fonctionner contre n’importe quel adversaire. Le drone, qui accompagne Rémi, ajoute quelques options supplémentaires, mais reste plus gadget qu’outil stratégique.
Peu importe la configuration choisie, tout finit par fonctionner contre n’importe quel adversaire.
Le bestiaire est une autre déception. En quelques heures, on a déjà l’impression d’avoir tout vu, les créatures se répétant à l’infini. Quant aux boss, rares et peu mémorables, ils ressemblent davantage à de simples monstres renforcés qu’à des épreuves marquantes. Ce manque de variété enlève beaucoup de souffle à l’aventure.
Et pourtant, malgré cette faiblesse, la présence des monstres reste significative sur le plan symbolique. Ils semblent moins exister comme de véritables menaces que comme une matérialisation des horreurs invisibles de la guerre. Chaque combat est une confrontation métaphorique, une rencontre avec les spectres que le conflit a fait naître. Si le gameplay ne parvient pas à les rendre inoubliables, leur existence dans le récit donne au jeu une portée supplémentaire.

Les énigmes : un appel à la patience et à l’observation
Là où Hell is Us surprend, c’est dans son approche des énigmes. Ici, il n’y a pas de solution facile ni de guide explicite. Le jeu impose son rythme, demande de lire, de réfléchir, de faire attention aux détails laissés dans les environnements.
Le jeu impose son rythme et oblige à se concentrer.
Ces énigmes ne sont jamais insurmontables, mais elles rappellent que le jeu souhaite avant tout impliquer le joueur, l’obliger à se concentrer. Là où les combats peuvent paraître trop permissifs, les puzzles redonnent un peu de densité à l’expérience. On aurait aimé davantage de complexité, mais l’intention est là : pousser à observer, plutôt qu’à foncer.

Avis Hell is Us : Une direction artistique marquante et un discours politique fort
C’est sans doute ici que Hell is Us frappe le plus fort. La direction artistique est superbe. Les environnements, sombres et dévastés, sont sublimés par une musique qui installe une atmosphère lourde et hypnotisante. On avance moins pour jouer que pour contempler, pour s’immerger dans ce décor où chaque ruine, chaque cadavre, raconte une histoire.
Mais plus encore que son esthétique, le jeu ose parler de la guerre sans fard. Il ne cherche pas à la justifier, ni à la simplifier. Chaque camp est montré dans sa brutalité, et personne n’est du côté du bien. Les crimes, les massacres, les idéologies vides sont dépeints avec une crudité qui rappelle des conflits bien réels : l’Ukraine, Israël/Palestine, les guerres de Yougoslavie.
Face à l’horreur de la guerre, choisir un camp revient toujours à cautionner une forme de barbarie.
En cela, Hell is Us ne se contente pas d’être un RPG d’action. Il est aussi une parabole. Les monstres ne sont pas seulement des adversaires surnaturels, ils incarnent l’ombre des hommes, la trace indélébile de leur violence. Ce monde en guerre n’a pas seulement engendré des ruines matérielles, il a donné naissance à des abominations qui ne peuvent être détruites que par celui qui refuse de choisir un camp.
Rémi, avec sa quête intime, devient le prisme de cette réflexion. Son refus d’appartenir à une faction, sa neutralité apparente, mettent en lumière une vérité troublante : face à l’horreur de la guerre, choisir un camp revient toujours à cautionner une forme de barbarie.

Avis Hell is Us : Fiche d’identité du jeu
🏢 Édité par | Nacon | 👥 Public | +18 |
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🛠️ Développé par | Rogue Factor | 🤝 Fourni par l’éditeur | Oui |
📅 Date de sortie | 04/09/2025 | 💻 Testé sur | PC |
🎮 Plateformes | PC, PS5 et Xbox Series | ⏱️ Temps de jeu | 25h |
✅ POINTS POSITIFS | ❌ POINTS NÉGATIFS |
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Une direction artistique saisissante | Exploration semi-ouverte trompeuse |
Une bande-son immersive | Quêtes secondaires répétitives |
Un propos politique fort et sans manichéisme | Histoire personnelle de Rémi convenue et dénouement faible |
Des énigmes valorisant l’observation et la patience | Combats rapidement trop faciles |
Un univers original mêlant guerre et surnaturel | Bestiaire et boss peu variés et mémorables |
Atmosphère oppressante et immersive |
Note : 15/20
Hell is Us est imparfait. Ses mécaniques ne tiennent pas toutes leurs promesses, son gameplay s’essouffle trop vite et son exploration, pourtant séduisante sur le papier, révèle ses limites après quelques heures. Mais au-delà de ces failles, le jeu impose une atmosphère rare, une réflexion sur la guerre et sur les monstres que l’humanité engendre. C’est un titre frustrant mais marquant. On y joue pour ses ambiances, pour sa direction artistique, pour sa portée symbolique plus que pour son gameplay. En ce sens, Hell is Us est moins un RPG d’action qu’un miroir tendu à nos propres conflits, une fable sur la violence des hommes et sur ce qui survit d’eux quand tout est détruit.